Prêtre, il fut heureux dans l’exercice de son ministère et peut-être tout spécialement à Saint Léger et à Buxy. Dans ces lieux, il eut privilège d’une certaine durée : 6 ans à Saint-Léger, 18 ans à Buxy et mieux que cela, il eut en charge des communautés « à sa main » qui lui convenaient parfaitement.

C’est vrai, quand nous songeons au ministère de Marcel, c’est bien le mot « communauté » qui nous vient à l’esprit. En effet, il eut toujours le souci et même l’obsession de la communauté. Il n’acceptait pas qu’une paroisse puisse être un simple rassemblement occasionnel de personnes qui s’ignorent et acceptent l’anonymat. Une paroisse doit être, peut être une communauté. Il se référait constamment aux quelques lignes des actes des Apôtres qui nous décrivent les premières communautés chrétiennes : fraternelles, chaleureuses, se réunissant pour la prière et le partage.

Sur la base de cette option communautaire, Marcel eut une pastorale toujours inventive. Souvent, je l’ai constaté, il était plein d’idées généreuses et astucieuses. Il n’aimait pas trop les consignes, les directives, les ordres qu’il fallait exécuter. Les communautés qu’il a façonnées n’étaient pas « copies conformes ». Elles étaient originales, surgissant chaque jour de l’enthousiasme et de la cordialité qui étaient leur règle essentielle.

Oui, Marcel eut la Pastorale inventive et cordiale. Ne croyons pas pour autant que tout fut facile. Ce qui faisait le charme et la richesse de sa personnalité avait un revers que chacun connaissait bien. Marcel avait une affectivité, une sensibilité qui le laissaient rarement en repos. Il s’impliquait entièrement dans les relations. Une rencontre était-elle réussie, Marcel connaissait un moment de véritable bonheur. Au contraire, une relation était-elle manquée ou contrariée, c’était l’abattement et le retour de l’angoisse.

Marcel était plus entouré et choyé que ne le sont bien des prêtres et pourtant il souffrit de la solitude. C’était à Buxy, je lui rendis visite, un jour « sans », un jour de morosité. Il me dit qu’il se sentait bien seul. Je lui fit remarquer qu’il avait une famille qu’il aimait et dont il était aimé, qu’il avait une communauté remarquable. « Bien sûr me dit-il c’est très vrai. Mais il y a autre chose…».

Je compris l’allusion et nous n’en parlâmes plus jamais.
Je compris ainsi qu’une fragilité reconnue et assumée peut être la source d’une belle fécondité apostolique. Pour construire le Royaume, je le pense, mieux vaut un prêtre qui accepte et assume sa fragilité qu’un prêtre engoncé dans ses certitudes et trop sûr de sa vertu. Saint Paul l’avait bien compris, me semble t-il, lui qui souffrait d’une mystérieuse écharde dans la chair et qui affirmait : « Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort ».

Marcel a voulu que la célébration de ses funérailles ait un air de Pâques. Oui, c’est pâques en plein hiver, car Marcel « sait maintenant en qui il a cru » : le Seigneur Jésus qu’il a aimé et servi dans le pâle aperçu de la foi, il le voit maintenant dans une lumière sans ombre. Ces communautés chaleureuses qu’il a voulues, il s’aperçoit maintenant qu’elles n’étaient pas des chimères inconsistantes mais l’ébauche et le commencement de cette grande communauté qu’il rejoint maintenant.

Cette paix du cœur et cette sérénité qu’il n’a que rarement connues dans le temps de sa vie terrestre lui sont maintenant généreusement accordées dans cette éternité qu’il a ardemment désirée. Oui, avec Marcel, soyons dans la joie de Pâques.

Eglise d’Autun – Emile Duhesme