En disant que Lazare a eu deux vocations, je ne risque pas de trop me tromper. Deux vocations : celle de prêtre et celle de cultivateur. Comment les a-t-il menées de front ? Là encore ses paroissiens le savent mieux que moi. Etait-il plus prêtre que cultivateur, était-il plus cultivateur que prêtre ? C’est une question qu’on pouvait se poser quand on était en dehors, quand on ne connaissait pas. De ces deux vocations Lazare a su n’en faire qu’une, au service de Dieu, au service des hommes. C’est vrai que Lazare se plaisait avec les animaux. La cure de La Celle était presque l’arche de Noé. A certaines heures la Nationale était coupée, Lazare en soutane avec un drapeau rouge, les vaches et la Céline avec son bâton.

Permettez-moi encore une petite anecdote : les prêtres du secteur de Lucenay, nous étions en réunion chez lui avec Mgr Le Bourgeois. Tout d’un coup, un violent coup à la porte. C’était la Céline : « Monsieur le Curé, venez vite, y a la vache qui fait viau ». Lazare s’est éclipsé en disant au Père Le Bourgeois : « Vous comprenez, Monseigneur… ».

Lazare a semé le bon grain. Il l’a semé dans ses champs. Il l’a semé dans l’esprit et dans le cœur de ses paroissiens et là, c’était la Parole de Dieu, la Parole de Vie qu’il semait. Il est vrai que c’est Dieu qui fait pousser la semence. Mais il a besoin d’un semeur. Lazare Bongrand a été ce semeur.

Eglise d’Autun – Robert Garnier

Mon cher Lazare, j’ai souhaité rendre un hommage bien mérité au prêtre, à l’homme de cœur, à l’ancien combattant. Ton apparence timide, effacée, un peu gauche, cachait une fermeté de caractère et une grande lucidité. Tu as assumé la présidence de la section des Anciens Combattants Prisonniers de Guerre de La Celle pendant plus de 40 années avec dévouement et efficacité. Tes remarques, tes observations, ton côté pratique, tes coups de gueule aussi sont restés légendaires.

Pour les paroissiens de La Celle, La Petite-Verrière, Roussillon, Anost, Cussy, tu resteras l’ami irremplaçable. Tu étais un homme de terrain, à la fois prêtre ouvrier, prêtre agricole, aumônier avec tes anciens combattants, tes frères des heures sombres. On n’allait pas voir le curé, il venait à nous. Tu savais si bien comprendre les gens, les écouter, partager leurs problèmes. Tu connaissais tout le monde et ta vie de travailleur infatigable s’apparentait tellement au quotidien de chacun que tes paroles étaient ressenties sincères et vraies.

Ta convivialité et ton humour quelquefois percutant ont laissé d’agréables souvenirs. Je ne citerai qu’une anecdote. A l’issue du baptême de mon petit-fils, voici une quinzaine d’années, tu nous avais invités à une dernière prière, à l’intention de nos politiques pour qu’ils soient « moins bêtes »… Quel éclat de rire dans l’assistance !

Tu n’avais pas peur de la mort, tu l’avais souvent côtoyée. Titulaire de plusieurs distinctions militaires, tu venais d’avoir 94 ans en juin dernier et tu laisses un vide immense… Adieu, Lazare, nous sommes près de toi, pour honorer ta mémoire et dire notre fierté d’avoir été tes amis.

Eglise d’Autun – Colonel Frédéric Bellet, maire de la Petite-Verrière